Interview DAGOBA
Shawter
L’avènement du groupe de death mélodique marseillais semble arrivé avec BLACK NOVA le 7e album studio qui sort chez SONY Music le 25 aout 2017.
Sombre et puissant, ce métal moderne innovant va remuer les plus sceptiques d’entre vous jusqu’au fond de leur souvenirs les plus enfouis. Rien ne semble arrêter son leader SHAWTER depuis 1997 et à présent plus que jamais, ayant décidé malgré tout, de bousculer l’ordre établi sans état d’âme ? C’est-ce que nous avons cherché à savoir chez AMONG THE LIVING.
A l’écoute de l’album on découvre un vrai renouveau au niveau du son qui fait penser à DIMMUBORGIR et SEPTICFLESH pour certaines ambiances. Qu’en penses-tu ?
Ce sont en effet deux groupes dont j’adore les créations. La grandiloquence présente dans leurs albums me parle, c’est une atmosphère qui sied à merveille avec le Métal que j’aime.
Après, nous sommes peut-être plus orienté Indus que ces deux géants peuvent l’être, et même si certaines composantes sont communes, je suis certain qu’il est impossible pour l’auditeur de confondre un titre de Dagoba et l’un des leurs.
Pour quelles raisons ces influences sont elles ressorties en ce moment ?
Je pense qu’elles ont toujours été présentes dans nos disques, mais peut-être que le ratio a un peu évolué. Les capacités techniques aussi. Eux ont eu plus rapidement les moyens pour pouvoir obtenir des bandes de vrais orchestres, quand il nous a fallut composer avec des machines. Aujourd’hui la technologie est telle qu’il est possible de simuler des pistes entières d’instruments symphoniques sans que personne ne puisse faire la différence avec le réel.
BLACK NOVA est assurément une page tournée, un échelon supérieur franchi haut la main, dans la carrière de DAGOBA ?
Chaque disque est censé être une évolution dans la carrière d’un groupe, et par chance et avec le soutien de notre public, nous avons pu ressentir cette évolution au fil des années.
Il s’agit tout le temps de se remettre en question, et de proposer quelque chose de nouveau, de frais et il est vrai qu’un fossé artistique sépare Black Nova de son prédécesseur.
Toutefois, nos auditeurs ne seront pas perdus, la martialité et la furie qui sont l’essence de notre musique sont (et seront) toujours respectées.
Par ailleurs, si tel est ton sentiment à propos de ce nouvel album, c’est plutôt bon signe !
Racontes nous l’histoire du choix du titre de l’album et dis nous quelques mots sur la pochette !
Comme souvent, le choix du titre de l’album vient d’un flash. Certainement pré-défini par une situation de vie ou une accumulation de faits, comme le sont souvent les rêves par exemple, mais c’est pas un truc que je mûri. A un moment, un titre me vient à l’idée, et j’arrive plus à m’en défaire, c’est comme une empreinte dans ma tête.
En l’occurrence, cette notion de renaissance illustrée par la Nova m’est venue lorsqu’il s’est s’agit de changer de line-up pour que le groupe puisse retrouver sa sérénité et sa joie de vivre.
Seth – de Septic Flesh s’est une fois de plus occupé de l’artwork. Nous sommes super potes et il y tenait.
Comme d’habitude, on a longuement parlé du contenu musical et il a pondu cette pochette sublime et forte, qui illustre parfaitement ce rejet que nous avons dû opérer pour aller de l’avant.
Les textes sont également soignés, pourrais tu m’éclairer sur le sujet ?
Chaque titre contient une métaphore cosmique. Que ce soit à propos du soleil, des comètes, de certaines constellations, du vide de l’infini… J’ai voulu explorer les sentiments humains dans l’échelle immense du cosmos. Ce qui fait relativiser sur à peu prêt tout, tu t’en doutes. C’était important, salvateur et très inspirant.
Tu as explosé l’ordre établi dans DAGOBA en intégrant deux nouvelles recrues JL DUCROISET (guitare) et Nicolas BASTOS (Batterie) ? As-tu eu des états d’âmes à prendre ces décisions drastiques qui ont surpris voire déstabilisé votre fan base ?
Je n’ai rien explosé du tout. Les personnes qui ont perdu le fil conducteur d’un groupe qui pour moi est le suivant : d’abord, les intérêts du groupe, ensuite, les intérêts personnels, ont explosé l’ordre établi. Moi j’ai réagi avec ce que la situation m’a laissé, en utilisant cette déception profonde comme carburant. Fort heureusement, nous avons dans notre réseau de super musiciens (doublés de super personnalités) qui ont bien compris ce qu’il se passait, car ce que le public sait, est souvent très loin de ce que le milieu connait. La vie d’un groupe n’est pas dicté par la com’ sur facebook. Un groupe c’est une aventure de vie. La réalité. Tout s’est donc fait naturellement avec Bastos et JL.
Je t’imagine aller « à la guerre » chaque matin, est-ce l’image d’un guerrier que tu souhaites donner ?
Le matin je vais à la salle de sport, pas à la guerre. Les seules choses pour lesquelles je me bat sont : ma famille, mes amis, mon groupe. Comme tout le monde en fait, se battre pour ses proches et ses projets ça n’a rien d’extraordinaire. Il y en a qui se battent pour qu’on puisse continuer à vivre dans la paix et dans un territoire libre, eux, sont à féliciter. Quand à mon image, elle a été souvent écornée dans mon dos, mais j’ai constaté que depuis que les gens cherchent à savoir d’eux-mêmes qui je suis, ce que je dis, pas ce qu’il paraît que j’ai dit ou fait, tout se rectifie. Je n’ai jamais volé le goûter de personne, et j’ai toujours donné mon max sur scène, quand il fallait sourire je l’ai fait, quand j’étais trop épuisé pour le faire je n’ai pas fait semblant, je suis allé faire comme tout le monde : me reposer.
Cet opus a été composé à nouveau seul comme pour « Tales of the Black Dawn » ?
Oui, comme toute la discographie de Dagoba.
Pourquoi ressens-tu le besoin d’un tel individualisme ?
Non pas par individualisme, mais parce que j’amène des riffs quand personne d’autre ne le fait. Une année (entre Poseidon et Post Mortem Nihil Est), j’ai pris la décision d’attendre les riffs des autres membres du groupe. Résultat : une année blanche.
D’ailleurs, alors que nous sortons à peu près un album tous les deux ans, ces deux-là sont sorti avec un écart de trois ans. CQFD. Quels seraient les reproches si on ne sortait plus d’albums tout ça parce que j’attends les riffs ? Ce serait la mort du groupe. La dernière chose que j’envisage.
Et pour revenir sur l’individualisme, je déteste ça. Je fais de mon mieux pour être un bon co-équipier, une fois les riffs proposés, tout le monde dans le groupe à toujours eu un droit de véto si l’un ou l’autre ne plaisait pas. Pour l’interprétation, les gars ont carte blanche, on discute ensemble, on fait un travail d’équipe, quoi.
Tu sais, quand tu creuses un peu, c’est rare qu’un groupe compose tous ensemble, les chansons sont souvent l’oeuvre d’un, voire deux musiciens. Notre mode de fonctionnement est donc banal.
Ne penses tu pas qu’à long terme tu pourrais t’entourer de musiciens interchangeables, ce qui ferait prendre à DAGOBA d’autres directions ? y as-tu pensé ? Est ce que cela te tenterai finalement d’être totalement seul aux commandes, affranchi de toute obligation amicale ou relationnelle qui peut s’avérer être un frein à ton ambition ?
Non, je ne l’envisage pas, et ne l’ai jamais envisagé. J’aime la notion d’équipe. Quand tout le monde tire dans le même sens, un groupe est plus fort. Quand on essaie de le détruire de l’intérieur ou d’en récupérer l’essence, c’est plus compliqué à gérer.
De quelle manière as tu recruté Nicolas Bastos et pourquoi (quelles qualités avait il en plus) ?
J’ai toujours apprécié Nicolas en tant qu’humain et en tant que musicien. D’ailleurs, il aurait été plus apte à répondre à ta question précédente. Il sait à quel point je lui fais confiance pour tout ce qui concerne son travail dans le groupe. Ce qu’il a en plus : il a compris qu’un groupe n’est pas une somme d’individualité, et qu’ainsi, la musique prend tout son sens. Dans la retenue aussi la musique est belle.
Comment s’est passé son intégration humaine et musicale ? S’est il adapté facilement aux anciens et nouveaux titres ? A-t- il eu une marge de manœuvre personnelle ? Attendais tu de lui un souffle nouveau ?
L’intégration s’est fait naturellement, on rigole beaucoup, on parle de plein de truc autre que LA BATTERIE. Sa marge de manœuvre fût totale, ses parties lui appartiennent, et même si une ossature des morceaux existait déjà quand il est arrivé, il a apporté une finesse et un groove qu’on n’a jamais eu auparavant.
Pour ce qui est des anciens titres qu’il a du apprendre, il a d’abord repris exactement les anciennes parties pour ne pas choquer notre public et, par retouches il distille sa façon de voir les choses, jusqu’à aujourd’hui d’ailleurs.
La musique est un art vivant, il fait vivre notre discographie : bravo et merci !
Qu’est ce qui est prévu pour le moment au niveau des tournées… un nouveau Hellfest d’anthologie ? Japon à nouveau ? USA ? tu as toujours le chic pour brouiller les pistes et emmener DAGOBA là où ne vous attend pas.
Eh bien je continuerai : nous serons là ou on ne nous attend pas ! haha… Plus sérieusement, nous serons en tournée en France / Belgique / Suisse / Maroc entre Septembre et Décembre, puis nous repartirons certainement sur une belle tournée Européenne en début 2108.
La tournée au Japon a été un succès que nous ne soupçonnions pas, donc il est probable que nous y retournions rapidement. Quant aux USA et les festivals d’été, nous ferons en sorte d’y traîner nos bottes.
Cette année, pour des raisons d’exclusivité, nous n’avons pas pu faire le Hellfest malgré une belle proposition de leur part, mais nous espérons y retourner au plus vite car nous adorons nous y produire.
J’imagine que chez Sony le budget va pouvoir vous permettre de plus grandes choses ? Lesquelles par exemple ?
Nous sommes producteurs de Black Nova, donc à vrai dire les moyens c’est le groupe qui les a mis au départ. Mais nos labels respectifs que sont : Sony / Century Media / Ward Records, nous soutiennent et nous offrent une logistique fabuleuse pour mettre en place et promouvoir l’album. Nous les remercions grandement pour tous les efforts qu’ils font pour nous, et il est vrai que nous sommes plus que bien entourés pour que tout se passe bien pour cette sortie.
Ensemble, oui, nous essaierons de mettre en place de plus grandes choses pour notre public, que ce soit au niveau des concerts ou de la diffusion du groupe.