Black Label Society, Templiers du métal
avec MONOLORD
Paris – Bataclan
Jeudi 8 mars 2018
Tel un remake d’Easy Rider, les vestes en jean se pressent devant un Bataclan exalté. Les bikers de la capitale sont nombreux à s’être déplacés, pour un rendez-vous heavy qui s’annonce incandescent, au-delà de la pluie battante qui martèle les pavés parisiens.
Le trio de Monolord entame le show, d’un son plus doom que stoner. Formés en 2013, les Suédois sont d’ores et déjà dotés d’une aura de plusieurs décennies. Electric Wizard et les débuts de Black Sabbath ne sont jamais loin, escortant les riffs d’un blues rouillé. Dense et vibrante, chaque mélodie évoque la lourdeur des berges poisseuses du Mississipi. La salle reste plongée dans un noir d’encre d’outre-tombe, omniprésent. Seuls quelques rayons bleutés permettent d’apercevoir des mains frénétiques, dans un corps à corps endiablé avec leur double instrumental.
La voix de Thomas Jäger se fond dans la litanie grasse de la guitare. Ces visages absents noircis par l’obscurité semblent damnés, en proie à des invocations ambiantes. Tube phare de leur dernier album Rust de 2017, Hail Lucifer ne laisse plus place aux suppositions… Avec une série de morceaux noueux qui prennent à la gorge, les accords plus machiavéliques les uns que les autres envoûtent l’audience conquise.
C’est non sans émotion que le rideau old school s’abat sur le plancher frémissant, aux airs de Black Flag affublé des armoiries pirates de Black Label Society. Zakk et ses comparses de longue date font leur entrée, entre volutes de fumée, croix de fer à tout-va, et bouquet de crânes en résine en guise de décorum. Sous un air théâtral, l’authenticité de la formation américaine aux airs de « Hell’s Angels » est palpable.
Les Black Label Society s’attellent aux classiques Suicide Messiah et Bleed For Me, sans oublier le moment ballade In This River. La setlist gagnante n’est pas sans surprise, avec bon nombre de titres issus de leur nouvel opus Grimmest Hits. Tout juste sorti en janvier 2018, le son très dense qui s’en dégage n’a jamais été aussi heavy. De ses modulations oscillant entre voix claire et caverneuse, Zakk Wylde délivre des textes à la symbolique forte et poétique, digne succession des grands paroliers que sont Johnny Cash, Neil Young ou Bruce Springsteen version hard rock.
Les pontes du métal sudiste mélodique penchent vers les harmoniques bluegrass. Zakk Wylde, « Lone Wolf » du New Jersey, promène sa carrure de héros à l’aura mythologique de part et d’autre de la scène, qu’il colonise de son aura dense. Tout en mineur, ses solos évocateurs rappellent son ancienne place de guitariste d’Ozzy Osbourne. Le bougre change d’ailleurs d’instrument comme de chemise, mettant en scène chacun de ses modèles Signature aux spirales colorées inimitables.
Guerriers du Christ autoproclamés, les Black Label Society ont fondé un code d’honneur où la religion prédomine, fort en interrogations humaines et en thématiques de luttes intérieures. La proximité qui anime les quatre diables à coup d’accolades est touchante, résultante de vingt ans d’existence d’un groupe aux idéaux forts.
Somptueux, Zakk abandonne la scène le temps d’un solo interminable, se fondant dans une audience ébahie et transcendée. Au milieu de la fosse, puis au balcon, le colosse à la carrure primitive flirte avec le vide, suspendant sa guitare au plus près des balustrades. Le final de Black Label Society, tout en lever de poing vers des cieux imaginaires, s’ancre dans la réputation légendaire du groupe grâce une communion avec le public unanimement acclamée. La devise de la formation, issue des codes moraux des clubs de motards, lui va somme toute à ravir : Strength, Determination, Merciless, Forever (Force, Détermination, Sans Pitié, Pour Toujours).
