Entretien avec Andreas Vingbäck (Heljarmadr) du groupe DARK FUNERAL
Interview réalisée le 20 septembre 2024 au Muscadeath festival
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Pourquoi continuer à croire en ce système ? Heljarmadr l’explique dans ses propos et le black metal. Bienvenue dans le paganisme !
Pourquoi avoir choisi de jouer ce genre : du black metal ?
Heljarmadr : C’est une question importante. C’est venu assez naturellement, en fait. C’est comme explorer les faces sombres de ta personne. Les autres influences proviennent de films paranormaux, d’horreur, de livres d’horreur et des séries de tueurs en série. Le film The Omen est sûrement le film qui m’a poussé vers le black metal également, tout comme Massacre et d’autres films de série B. Comme la plupart des groupes de tous les pays du monde, nous sommes anti-religion.
Pourquoi avez-vous choisi ce type de masque sur scène ?
C’est pour paraître plus important d’abord. Puis en expérimentant, tu te sens à l’aise avec. Quand tu te regardes dans le miroir, tu t’identifies finalement à ce personnage avec ce maquillage.
As-tu l’impression d’être quelqu’un d’autre avec ton masque ?
Non, je suis toujours moi-même, le meilleur de moi-même, sans avoir besoin de penser à l’homme qui doit payer son loyer, ses factures. C’est être moi-même et libre de tout. Dès qu’on met son maquillage, on sait qu’on va sur scène. C’est un moment sacré où tu peux mettre de côté tout le reste. Durant ces deux heures, c’est un moment unique où rien d’autre n’existe. Entre l’instant où on se couvre de maquillage et celui où on le quitte, on se retrouve en paix. C’est assez paradoxal car on joue sur une scène agressive mais on efface tout le reste. Ces maques faciaux sont aussi en connexion avec la musique que l’on joue. Cela fait partie intégrante de nous-mêmes. Tu sais, aujourd’hui, dans ce monde hyper connecté, ce moment est dédié uniquement à la scène et cela fait partie de notre performance artistique.
Est-ce que vous aimez changer de masque ou gardez-vous le même ?
On garde toujours les mêmes : c’est une sorte de rituel. Quand on se regarde dans le miroir et que l’on commence à l’appliquer, cela vient naturellement. On n’a pas de maquilleuse. C’est comme si quelqu’un voulait t’habiller ! Non, non, je m’habille tout seul.
Les pays de l’Europe du nord accueillent de nombreux groupes de black metal. A ton avis, est-ce un style populaire dans le metal dans les pays nordiques ?
Je ne sais pas. Cela fait trente ans et ça va et ça vient : les gens, les groupes, les tendances. Mais je pense que nous sommes en connexion avec notre culture pagan et de ses rituels ancestraux. C’est pareil pour les Indiens d’Amérique du nord qui se peignent le visage d’une certain façon quand c’est la guerre, par exemple. Cela remonte à l’ère avant Jésus Christ ou l’ère pré-colombienne pour l’Amérique latine.
J’ai vu des groupes de metal du Mexique avec leurs propres styles de masques de l’ère pré-colombienne. C’est magnifique ! L’idée de l’avant Jésus Christ, c’est d’éloigner la religion chrétienne. Nous avons tous vécu par le même passé, par ce chemin creusé par la religion que nous avons été contraints de suivre. Que l’on vienne d’Europe, d’Amérique, d’Asie ou d’Afrique, nous avons tous les mêmes racines pré-chrétiennes, puis on nous a conduits vers la religion chrétienne.
Est-ce que, enfant, on t’a imposé la religion chrétienne ?
Oui, j’étais obligé d’aller à l’église. Je viens du nord de la Suède et on a été contraints d’y aller et de croire à toutes ces pacotilles. Quand tu commences à y réfléchir, tu te dis que ce ne sont que des conneries ! Tu te libères de tout ça. Cela ne fait plus sens d’y croire comme les Romains s’y étaient montrés fidèles et croyants. Depuis la France, jusqu’à l’Allemagne, l’Espagne, la Scandinavie et l’Amérique du sud, nous avons une culture identique. Mais pourquoi continuer de croire aujourd’hui à ce système? Cela n’a pas de sens.
Tu portes une médaille arborant un pentagrame. Qu’est-ce que cela signifie pour toi ?
C’est un signe de rébellion mais plus dans la nature des choses que contre l’établissement religieux.
Vous tournez dans le monde entier : est-ce que vous avez des pays ou publics de prédilection ?
Le meilleur public est celui que tu as devant toi lorsque tu joues. C’est bien partout. Il y a toujours un côté magique quand tu te trouves dans un lieu pour la première fois. Nous passons toujours des moments superbes en France. En Amérique du sud, les fans sont étonnants et dégagent de très bonnes vibrations. J’ai passé quelque temps là-bas et j’ai beaucoup aimé la passion qu’ils portaient en eux. Ils ont le rythme dans le corps. Par contre, quand on joue en Europe du nord, tu te demandes si le public a aimé car personne n’exprime ses émotions pour ne pas gêner.
Les scandinaves sont très disciplinés et respectueux parallèlement.
Ils apprécient le show à leur manière. Une fois, je me souviens qu’on jouait en Europe du nord, je me suis mis à croire que tout le monde passait un moment désagréable. En fin de compte, j’ai pris conscience qu’ils appréciaient la fête en leur for intérieur. En tant que groupe, il faut séparer les deux : en Europe du nord, ils apprécient pour eux-mêmes alors qu’en Amérique latine, le gens s’expriment davantage en dansant. C’est juste une façon différente d’exister.
A la fin de l’interview, je remercie Heljarmadr qui nous quitte pour aller se maquiller et quitter ce monde pour s’élever vers l’obscur.