HELLFEST 2019 Day 3
Dimanche 23 Juin 2019
Généralement le dimanche, on est assez heureux car on sait que de nombreux touristes venus ici pour l’ambiance le samedi vont rentrer à la maison pour raconter à leurs familles : « oui j’y étais ». Il raconteront qu’ils ont vu Kiss, ZZ Top, Whitesnake sans oublier leurs rencontres avec des gens bizarres, tatoués et déguisés … Ensuite à Noël en famille ils pourront devenir, le temps d’un soir, la fierté de leur maman…
Bilan : en arrivant sur le site on voit qu’il y a au moins 20 % de festivaliers en moins que le samedi. Quel bonheur. Pouvoir circuler de la Warzone à la Temple en passant par la Altar jusqu’au Mainstage sans faire un slalom géant pour éviter les corps inertes jonchés sur le sol reste un bonheur simple.
À Clisson ou comme ailleurs le dimanche surtout vers midi c’est le moment de la Messe. Mais sur le festival sous la Temple c’est l’heure de Bliss Of Flesh. Les nordistes joue un black/death gorgé de riffs et d’hémoglobine coagulée avec des paroles blasphématoires. Necurat commence par une cérémonie sanguinolente avec les autres musiciens en les bâtisant de sang. Ensuite le set peut enfin commencer, Necurat est toujours aussi possédé sur scène avec ce regard inquiétant scrutant la foule accroché à son pied de micro en fer forgé. Les autres musiciens ont des taches de sang qui ont été porté par le chanteur lors de la cérémonie d’ouverture.
Les musiciens réveillent la Temple en ce dimanche dominical à coup d’accélération puisant dans leur très belle discographie qui s’étoffera d’un nouvel album début 2020.
Les Français par leur musique et par leurs énergies ont remis les festivaliers en ordre de marche pour ce dernier jour de festival. Il est temps pour moi de me diriger vers la salle des interviews pour constater l’annulation de mes interviews. Que faire en attendant ! Patienter ! Attendre en observant le soleil qui tape très très fort ? Le temps passe doucement mais sûrement, il faut retourner à nouveau sous la Temple pour admirer un groupe hors norme qui vient du Mexique. Pour les avoir vu au Cernunnos en début d’année je peux vous dire que c’est toujours une bonne expérience d’observer Cemican sur scène. Outre le faite que le groupe joue un death metal relativement classique certains des musiciens vont utiliser des instruments traditionnels tout en jouant sur l’imagerie que l’on connaît des Incas. Les colifichets et le côté cérémonial vont réveiller les festivaliers assez rapidement grâce aux plumes du maître de cérémonie.
Qu’il est facile de se déplacer aujourd’hui sur le site, pourvoir s’arrêter et prendre une bière avant de se diriger vers la Mainstage, prendre son temps et discuter avec des amis sans être bousculé par une horde de furieux. Depuis le temps que je les attendais à Clisson, je suis touché de voir enfin les Blackberry Smoke sur une scène du Hellfest.
Nombreux étaient ceux qui disaient que le groupe était trop southern rock pour venir à Clisson. Et je leur répondais alors pourquoi Lynyrd Skynyrd et Molly Hatchet étaient déjà venus? D’autant que la musique de Blackberry Smoke est l’avenir de toute cette musique américaine qui vient du sud, qui sent le soleil et la chaleur de l’asphalte fondu. Aux sourires qu’on lit sur le visage des américains ils ont visiblement l’air très heureux de fouler les planches du festival.
Si tu n’es pas transporté en Géorgie en écoutant leur musique je ne sais pas ce que je peux faire de plus pour toi. Ces musiciens sont extraordinaires, bienveillants, gentils, professionnels et talentueux et sont sur les routes plus de 250 jours par an. Ils reprennent même “Come Together” des Beatles. Aujourd’hui sur la Mainstage les sudistes ont pris les devants et ce n’est que le début de la journée. Juste après encore un groupe qui a écumé toutes les scènes du Hellfest et ce depuis de nombreuses années. C’est Clutch. Ils dégagent toujours autant de puissance après toutes ces années de bravoure sur tous les continents. Leur bon gros rock/Stoner qui sent bon la poussière tombe à point nommé avec les tourbillon de vent qui font tourner les têtes. Après le concert ça se vide un peu devant la grande scène.
Ça tombe bien on en profite pour approcher au plus près des Américains de Testament. Chuck Billy, égal à lui-même avec son demi-pied de micro devant lui en le grattant comme une guitare harangue le public, appuyé par les riffs incendiaires de ses compatriotes. L’ambiance thrash metal de la journée ne fait que commencer.
Plus haut sous la Temple Skáld, les poètes français relatent les exploits guerriers et épiques de leurs valeureux aïeux. Musique qui nous fait penser bien sûre et d’une façon simpliste a Warduna mais qui possède tout de même sa propre couleur et attire de nombreuses personnes autour de la tente en ébullition .
Aujourd’hui sur les scènes principales les Américains et en particulier les thrashers sont de sortie. Les musiciens d’Anthrax ne sont pas là pour faire de la figuration. Ils veulent à nouveau prouver qu’ils n’ont rien perdu de leur agilité en courant et sautant (surtout Ian Scott) sur les planches à coup de riffs et d’accélérations. Ils vont retourner les fans avec un set expéditif et sauvage.
Comme par hasard on commence à voir apparaître dans les premiers rangs de nombreuses personnes qui commencent à se placer pour le dernier passage à Clisson de Slayer…apparemment on commence à jouer des coudes. Ce que j’aime avec Anthrax c’est de pouvoir voir la simplicité avec laquelle Joey Belladonna va demander à un des photographes placé sur le côté de la scène de le shooter avec la foule en arrière fond comme un énorme selfie. Le moment tant attendu par de nombreuses personnes va enfin arriver. Joey crie “Hellfest, do You want thrash metal” avant d’envoyer « Antisocial » de Trust revu et corrigé par les américains. Ce qui fait instantanément sauter le public dans une ambiance hystérique et désordonnée pour montrer leur adhésion aux américains qui savent jouer sur la corde sensible de la fierté française dès année 80’.
Les photographes rentre dans le pit de la Altar dans une tente pratiquement vide sur Vltimas. Il est vrai que de nombreux festivaliers ne savent pas qui se cache derrière le groupe. On y retrouve Rune Eriksen (Aura Noir, ex Mayhem), Flo Mounier (Criptosy) et le tant attendu David Vincent (ex Morbid Angel). Il faut rappeler qu’au même moment il y a Lynyrd Skynyrd qui fait lui aussi ses adieux sur la Mainstage et les fans d’Emperor se mettent déjà au garde-à-vous devant la Temple.
Ça commence à coups de gros riffs et le son d’une batterie qui claque un peu trop pendant que David Vincent arrive sur scène avec son long manteau et son chapeau de cow-boy. C’est quand même amusant de le voir sans sa basse déambulant de gauche à droite pour trouver une occupation. Ses vêtements ne rendent pas hommage aux texans qui jouent en même temps, c’est son look actuel.
La musique est puissante et le death/black metal tiré de leur ultime album de haute volée Something Wicked Marches In. On sent individuellement le talent de chaque musicien, un groupe de stars qui on l’espère continuera par la suite.
Dans les allées en se dirigeant vers Lynyrd Skynyrd, on commence à voir apparaître le drapeau des confédérés. Les sudistes sont dans la place. Il y a aussi une grosse marionnette à l’effigie de Donald Trump ne le mettant pas franchement en bonne posture. Le groove est là. Les notes de piano étincellent ce début de soirée avec « Mister Saturday Night ».
Derrière ses Ray-Ban Johnny Van Zant nous dit « You don’t know this song My friends? ». Avec des images de familles américaines qui passent sur les écrans. « Let me see more » qu’il dit en annonçant « Simple Man ». Quelle émotion! Une grosse larme coulent sur ma joue recouverte de poussière. Les images d’archives du groupe qui défilent sur les écrans ne laissent pas les gens indiffèrent, la boule au ventre on regarde ces images qu’on ne reverra peut-être plus jamais.
Pour tirer un trait sur cette nostalgie qui nous envahit, ils enchaînent avec le succulent « Gimme Three Steps ». Ensuite comme lors de l’Independance Day à Jacksonville Ils balancent, avec le piano bastringue de « Call me the Breeze » la reprise de JJ Cale tout en filmant en gros plan les doigts du pianiste qui nous fait le signe du diable. Les yeux s’humidifient à nouveau avec « Sweet Home Alabama ». Que dire? Et bien reprendre un Jack Daniels tout en regardant Van Zant avec son drapeau bien accroché sur son pied de micro poussé par les cœurs féminins sur scène avant de terminer par le légendaire « Free Bird »…
Place ensuite au black metal avant-gardiste des norvégiens d’Emperor. Pour leur quatrième passage au Hellfest, ils vont nous jouer l’album Anthems Of the Welkin at Dusk en entier. Les titres s’enfilent comme sur un chapelet sans oublier de revenir nous mettre une petite couche avec en rappel « I Am the Black Wizard » et l’inévitable « Inno a Satana ». Quelle maîtrise et quelle facilité ils ont d’interpréter tout ces titres d’une complexité inouïe.
Les fans de Georges Fisher sont sous la Altar. Avant même que ne débute le concert les musiciens ne tiennent pas en place sur le côté de la scène. Ensuite un concert de brutal death avec les maîtres que sont Cannibal Corpse ne peut que dégager une violence incroyable à l’image du headbandging interminable de George. Pour faire plaisir aux fans les américains n’hésitent pas à piocher les titres dans un répertoire de 14 albums. La dextérité de chaque musicien fait plaisir à voir entre riffs exécutés à la vitesse du son, les growls impressionnants du chanteur et une rythmique dévorante.
Les gros plans de Slash sur la Mainstage montrent combien le guitariste s’investit à fond dans sa musique et ne le fait pas à l’économie. Les gouttes de sueur perlent de ses bras sur le manche de sa guitare. Miles Kennedy showman doté d’une classe et d’un charisme exemplaire donne du plaisir à une foule qui lui mange dans la main. Les riffs hard rock de leur discographie accompagnés de ceux de Guns N’ Roses font le plaisir d’un public immense qui attend aussi avec impatience la venue d’autres américains qui jouent dans un registre différent.
L’heure est grave et solennelle, la scène est projetée dans un rouge avec des flammes qui illuminent le ciel de Clisson. On a l’impression qu’un magma épais coule d’un volcan vers les prairies clissonaises. Tom Araya a rasé la barbe, il a l’air plus en forme que jamais. Son sourire communicatif nous montre bien que la soirée est spéciale et que cette prestation restera dans les annales du festival. Le public déguste ces derniers instants très émouvants aux travers de titres plus récents comme “Repentless” ou “World Painted Blood” ou en espérant que le show ne se terminera jamais avec les incontournables comme “Chemical Warfare“, “War Ensemble“, “Seasons in the Abyss“.
Ensuite ce n’est plus qu’un rêve éveillé au travers de “Hell Awaits“, la légère pluie qui s’invite sur le bien nommé “Raining Blood” pour finir par le mythique “Dead Skin Mask ” et le tonitruant “Angel of Death” suivi d’un énorme feu d’artifice…
Ne voulant pas rester sur cette note assez triste qui nous rappelle de nombreux souvenirs ( et que le temps passe vite) et pour se remonter le morale rien de tel qu’une prestation démoniaque de Deicide menée de main de maître par un Glen Benton possèdé. Fidèle à lui même, l’américain maltraite sa basse les yeux presque révulsés tout en chantant son amour de Satan dans son micro.
La soirée s’écoule avec le mythique Tormentor, dont le leader n’est autre que l’illustre Attila Csihar que l’on retrouve dans Mayhem. Toujours aussi théâtral, avec son énorme crucifix retourné sur sa poitrine et son maquillage dégoulinant, il guide les hongrois dans un black metal tourmenté et inquiétant. Attila joue de ses performances vocales impressionnantes passant de growls abyssaux à des cris bestiaux. C’est du roots, du “in your face” à l’ancienne. On prend du plaisir en voyant pour la deuxième fois jouer Tormentor en France. Et même si le groupe existait avant qu’Attila ne rejoigne Mayhem, la dernière fois qu’ils étaient passés, c’était pour les 20 ans de Garmonbozia à Rennes en novembre dernier.
Même si parfois on se sent abandonné au milieu d’une foule parfois trop dense; qu’en échangeant avec des amis on se dise que l’on est passé à côté de trucs sympas, on est toujours prêt à revenir entre les vignes pour prendre sa dose de décibels l’année suivante. Il n’y a pas un Hellfest il y en a des dizaines de milliers. Autant d’histoire à raconter que le nombre de festivaliers réunis en juin à Clisson. On voudrait toujours en voire plus, vivre le festival plus intensément mais l’être humain à ses limites. Il ne peut se dupliquer pour courir de scène en scène pendant plus de 3 jours, il ne peut pas toujours avoir une belle vision de la scène, ni avoir un son parfait.
Mais après quelques jours quand il revient chez lui, le cerveau d’une manière inconsciente reprend le dessus, soude les connexions et forge avec une lave incandescente les souvenirs d’une nouvelle édition à jamais graver pour l’éternité dans son cerveau…
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