HELLFEST Open Air 2023
Réflexion et déambulation…
Après une édition gargantuesque qui marquait le 15ème anniversaire du Hellfest en 2022 (après deux années d’absence à cause du Covid), Il était intéressant de savoir comment allait évoluer le festival cette année.
Comme on le sait l’être humain est de nature jalouse. La réussite des uns ne fait pas obligatoirement le bonheur des autres. En général le français n’aime pas trop le succès individuel. Il en est de même avec le fan de Metal qui n’hésite pas à blâmer un succès national, surtout au travers des réseaux sociaux…
Le métalleux critique le Motocultor pour son côté amateurisme, mais n’hésite pas à se lâcher sur le Hellfest pour son côté trop professionnel. Alors où est le juste milieu ?
Depuis quelques années on parle de Disneyland du Metal pour décrire le Hellfest, personnellement je préfère « DisnHelland » c’est quand même plus sympa.
Je m’explique depuis cinq ans on croise plus de « touristes » sur le site que de vrais fans d’une des églises thématiques musicales comme le black metal, le death metal, le doom, le heavy, le thrash… La différence se fait entre ceux qui portent des t-shirts du Hellfest (majoritaires) et les autres à l’effigie de leurs groupes préférés. Mais bon, il faut bien reconnaître qu’ils sont curieux.
Avec le Guide du Routard, on part visiter un lieu, un endroit, un pays parce que l’article nous a donné envie d’y aller. De mon côté on peut écrire ce qu’on veut sur certains festivals, jamais je ne me transformerais en touriste pour aller à Solidays, Les Vieilles Charrues ou We love Green… Qu’on aime les curieux ou pas ils ont le mérite d’essayer de découvrir un lieu, de l’apprécier ou pas et de revenir ou pas…
On nous explique aussi que les gens viennent au Hellfest pour se faire une overdose de groupes, mais tout le monde ne vit pas en Île-de-France. Il est vrai que parmi les groupes qui jouaient à Clisson cette année certains étaient déjà passés par la capitale depuis l’automne dernier. Il est agréable pour des gens qui habitent loin de la capitale de pouvoir prendre sa dose de Metal en quatre jours. C’est peut-être un traitement de cheval mais quand on n’a pas le choix de prendre des doses homéopathiques on est prêt à les prendre en intraveineuse.
Le metalhead est râleur mais il est aussi mélancolique.
Le site a bien sûr changé avec à l’entrée du festival La structure dédié au merchandising où la file d’attente n’a cessé de s’agrandir au fil du week-end : le Sanctuary. N’oublions pas que le merchandising, comme les débits de boissons font partie du nerf de la guerre. Il faut du cash pour faire venir des têtes d’affiche qui en demandent toujours plus… ce qui prédit sûrement un très gros nom l’année prochaine…
De mon côté je regrette l’éloignement de la Valley car il était pratique lorsqu’on sortait de la Temple d’aller jeter un œil ou de déclencher un cliché dans cette jolie vallée ou l’herbe n’était peut-être pas toute vert mais toujours odorante.
Les soucis de circulation devant la Altar et la Temple sont toujours de plus en plus compliqués surtout quand on commence à approcher des 18 heures et que les groupes importants montent sur scène. Les gens s’allongent devant les écrans et c’est à cloche pied qu’on doit trouver son chemin sur un terrain miné.
Mais l’âme du Hellfest est toujours présente grâce à la Warzone où le public est toujours aussi déchaîné même si la programmation n’était pas la plus intense cette année.
Les grappes de raisins du vignoble clissonnais avec lesquelles on élabore le muscadet doivent jouer un rôle dans les sourires euphoriques que l’on croise dans cet endroit bien particulier protégé par le regard du parrain indéboulonnable et qui nous manque de plus en plus… Lemmy. Sa présence en impose. Sa passion du rock n’roll nous aide à aller de l’avant et à nous lâcher en faisant des circle pits sur les pavés usés devant la Warzone. Les locaux ne s’y trompent pas et c’est au bar dédié au Muscadet que l’on croise le plus de clissonnais.
De mon côté cette année j’ai été agréablement surpris en découvrant Blackbraid. Groupe venant des Adirondack Mountains aux Etats-Unis. Les descendants des indiens nous délivrent un black metal indigène et raffiné. La musique des new-yorkais d’Imperial Triumphant est toujours aussi complexe à appréhender en live avec ce côté jazzy avant-gardiste mais toujours aussi passionnant à observer avec leurs masques.
Belenos et ACOD jouent trop tôt et c’est un peu la règle pour les groupes français au Hellfest qui passent sur les planches de la Temple. Ils ont pourtant de belles discographies, des univers qui leur sont propres.
Les jeunes groupes de thrash/heavy/speed comme Evil Invaders, Enforcer ou les virtuoses progressistes de Vektor nous donnent à espérer que la programmation n’hésitera pas dans un futur proche à programmer une après-midi bien thrash sous l’Altar qui déclenchera plus de slam que cette année avec des groupes comme Bütcher, Vulture, Deathammer, Bunker 66, Ambush ou Cruel Force…
Der Weg Einer Freiheit ne se repose pas sur ses lauriers et sait à chaque fois se renouveler et repousser plus loin son black metal vers des contrés encore inexplorées.
On aime aussi retrouver Gorgoroth qui depuis quelques années a su renaitre de ses cendres grâce à un Hoest (Taake) qui apporte ce surplus d’énergie à une excellente prestation.
Vreid revient à Clisson après la visite guidée qu’il nous avait faite l’année dernière de l’album 1184 de Windir. Les norvégiens sont toujours aussi époustouflants bien que leur setlist laisse la part belle aux morceaux les moins violents.
Les embruns écossais de Saor nous apportent cette fraicheur musicale, sensible qui nous emmènent vers les landes mystérieuses gorgées de légendes et de tourbe enivrante.
La horde de huns venu de Mongolie munie de leurs instruments traditionnels frappe un grand coup. Même si pour des problèmes techniques les musiciens de The Hu s’y prennent à deux fois avant d’entamer leur set.
Le public s’est déplacé en masse et dépasse alégrement la tente pour se prolonger jusqu’à l’entrée du festival grâce (ou à cause) de l’écran géant au-dessus de la Temple, afin de tomber en transe en écoutant les chants traditionnels faisant vibrer la gorge (le khöömii) et les instruments à cordes tels que le morin khuur. Les descendants de Gengis Khan marquent cette édition avec leur fameux « hunnu rock ».
Les finlandais de Finntroll font le job sans nous en mettre plein la vue, tandis que la cold wave prend ses aises sous la Temple sans moi.
Avant de prendre sa retraite Sabina Classen de Holy Moses avec ses faux airs de Véronique Sanson prouve que l’âge n’a pas d’emprise sur elle n’hésitant pas à headbanguer sur scène comme une possédée.
Treponem Pal transforme la Temple en dancefloor à coup de metal industriel et donne de l’énergie et du bonheur aux festivaliers qui en ont plus que besoins, alors que dehors l’orage gronde et que les éclairs cherchent à rentrer en contact avec la terre au travers des structures métalliques.
Testament ne prend pas de risque et propose un set trop attendu alors que Candlemass assure une des plus belles prestations qui donne du baume au cœur.
J’ai aussi adoré la prestation d’Iron Maiden. Même si les années passent, les anglais arrivent toujours à se renouveler, n’hésitant pas à sortir un album et de partir en tournée. De sortir une setlist logique qui permet un dialogue, une interaction entre certains morceaux de Somewhere in Time et du « petit dernier » Senjutsu. Bruce Dickinson est une bête de scène, un monstre. Il y a du Mick Jagger en lui quand il s’adresse à la foule en utilisant la langue de Molière. Son humour anglais, ses yeux vifs et pétillants (une fois les lunettes enlevées) nous font passer un des moments des plus exquis du festival. On irait même jusqu’à prendre une « Cup of Tea » …
Avec Mötley Crüe on voit que les américains ont investi énormément sur la mise en scène pour en mettre plein la vue à coup de clips, de lights et de jolies danseuses. Même si Mick Mars nous manque, John 5 n’est pas en reste. Il remplace discrètement l’homme au chapeau Haut-de-forme avec élégance sans en mettre plein la vue. Il n’en profite pas pour en faire des tonnes. Il sait rester discret tout en sortant des solos respectant le guitariste historique qu’il remplace, tout en n’oubliant pas son passé musical en arborant le maquillage qu’il utilisait lorsqu’il jouait avec le Révérend Marilyn Manson.
Mais l’âme du Hellfest est toujours présente!
Le metalhead est râleur mais il est aussi mélancolique. Il aime se souvenir et se ressasser les éditions passées comme celle de 2007 où l’on avait bien galéré avec cette météo capricieuse qui nous avait embourbé jusqu’au genou. Alors oui effectivement cette édition passée était magnifique avec des groupes qu’on avait rarement eu l’occasion de voir sur notre territoire, mais quid d’une telle édition au temps de la surinformation ?
Je n’ose imaginer une telle édition en 2023. Le Hellfest aurait fait la « Une » des journaux télévisés. Les chaines d’infos auraient dépêché sur place des journalistes émérites spécialistes des musiques extrêmes, de scarification et de satanisme. Des experts biologiques nous auraient expliquer que la boue était dangereuse pour la santé. Des drones auraient analysé des signes cabalistiques lors des walls of death et que les circle pits tournaient toujours dans le sens contraire des aiguilles d’une montre. Sans parler des spécialistes de la météo prouvant que le volume sonore dégagé par les scènes entrainait un rassemblement de cumulonimbus au-dessus de Clisson…
Par ces souvenirs nous sommes toujours à la recherche de notre jeunesse passée. Maintenant on raisonne comme des enfants gâtés qui ont tout vu, tout entendu et qui ne savent plus vraiment ce qu’ils veulent. D’ailleurs lors d’un ressent sondage les français clament à 85% que c’était mieux avant…
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