Among The Living
Interview

SEVEN EYED CROW – Interview

Nous nous sommes entretenu avec le groupe SEVEN EYED CROW, à l’occasion de la sortie de leur nouvel EP “Icarus“.

Pouvez-vous présenter le groupe en quelques mots.

Nous somme issus des scènes fusion et métal alternatives bordelaise et parisienne. Le projet trouve des racines vers 2013 mais aboutit en 2015 avec la parution d’un premier EP « Dark Ways To The Sun ».  Nous avons évolué plus de 15 ans dans de nombreux groupes aux succès variables mais nous nous sommes trouvés autour d’une vision commune et surtout d‘un fonctionnement sain et sans conflits qui nous a unis. L’album « Organized Chaos » est venu assez rapidement mais le départ de Tom, notre bassiste, a limité notre capacité à le défendre assez longtemps. L’arrivée de Yoann à la basse, avec son expérience de «Nihil» et son professionnalisme nous a revigorés et amenés sur d’autres chemins.

Comment avez-vous vécu ces deux années de vaches maigres liées au Covid ?

Difficilement, comme tout le monde (rire). Cependant nous ne sommes pas des professionnels de la musique, en dehors de Yoann notre bassiste, et donc nous avons eu les difficultés de tous. Pour Yoann, il a perdu une grosse partie des ses revenus et a du se réorganiser pendant les confinements comme homme au foyer. Il a failli changer de voie. A ce jour c’est toujours très tendu et les reports de date successifs sans indemnisation sont durs à vivre. L’intermittence est gravement malmenée.

Comment fonctionne un groupe comme SEVEN EYED CROW, en termes de composition mais aussi de financement ?

Nous développons tous ensemble un canevas apporté par l’un des musiciens et nous le retournons, le tordons, le peaufinons pour qu’il devienne du S.E.C. Ce processus compositionnel est assez long car très démocratique mais nous permet de ne pas nous perdre. Le financement des activités du groupe est assuré par « Lunatik Music », qui est une association et un producteur géré par notre guitariste Oreye. Globalement, on est sur de l’autofinancement par nos activité professionnelles.

Y a-t-il des musiciens qui vivent de leur musique au sein du groupe ?

Yoann, notre bassiste est intermittent du spectacle comme technicien et musicien. C’est le seul professionnel de la musique de notre groupe. Nous avons tous les autres un travail à coté et vivons la musique en amateurs.

Un EP mais de longue durée!

SEVEN EYED CROW veut littéralement dire « corbeau à sept yeux ». D’où vient ce nom et quelle en est la signification ?

C’est venu comme une sorte de révélation mystique. Et si notre réalité, dans un lieu et un temps donnée, n’était qu’une des multiples couches ou dimensions d’un tout plus grand? En creusant plus loin dans le thème, nous avons imaginé sept réalités possibles. Sept mondes. Du passé au présent jusqu’au futur. Mais aussi de l’Enfer au Purgatoire et jusqu’au Paradis. Six couches, transcendées par la dernière : le rêve, comme un vaisseau pour passer de l’une à l’autre. L’imagination a fait le reste. L’idée d’un corbeau à sept yeux, chacun capable de voir travers une seule dimension, est devenue le nom du projet. C’est aussi un visuel terrible. Mais rien à voir avec Game of Thrones. 

Vous sortez un nouvel EP avec « Icarus », 3 ans après « Organized Chaos » qui était un LP. Pourquoi le choix de ce format ?

L’arrivée d’un nouveau bassiste, et la crise Covid qui nous a obligé à travailler à distance, nous ont empêché de nous lancer sur de nouveaux morceaux. Nous avons donc beaucoup arrangé et laissé murir ce que nous avions. A l’issue de ces cinq morceaux, nous voulions tourner une page et renouer avec de la scène et une actualité dont nous avions été trop absents. D’ou un EP mais de longue durée (27 minutes).

La production est particulièrement léchée et bonne. Ou avez-vous enregistré cet album ?

Nous l’avons enregistré sur Bordeaux chez « Bud Studio » géré par Matt le guitariste de Gorod. L’homme derrière le son est David Thiers du « Secret Place Studio », un des grands noms de la production Rock/Métal bordelaise comme Mobo du « Conkrete studio » qui avait fait les deux précédents opus. David est vraiment un magicien d’une grande patience et d’une grande compétence. Sa bonne humeur et son talent sont communicatifs.


seven eyed crow


Notre style est une « niche » musicale qui peut débouter pas mal de puristes.

 

Vous avez accueilli Yoann Roy à la basse. Qu’a-t-il apporté au groupe en termes d’influences et de composition ?

Yoann a beaucoup plus d’expérience que nous autres à la fois en tant que musicien professionnel et technicien du spectacle. C’est un compositeur prolixe et son oreille musicale est épatante. Il s’est glissé dans le groupe en gardant le groove hérité de Tom que l’on souhaitait, et en y apportant une énergie rock brute sans fioritures. Il est capable de lignes simples ultramélodiques héritées du grunge ou d’une pop à la « U2 » et de sortir du tapping basse en mesures asymétriques dignes de « Tool » ou de « Haken ». Il nous a désinhibés dans un songwriting plus complexe pour sûr et nous redonné confiance après le départ de Tom, qui a été difficile d’un point de vue émotionnel.

On sent une sorte de rupture légère avec Icarus par rapport avec Organized Chaos. Je le trouve plus posé, moins énervé et finalement plus aérien, à l’image d’un titre comme To My Old Man qui résume plutôt bien l’esprit du groupe. Qu’en pensez-vous ?

Ca correspond à l’état d’esprit du moment. Après plus de 20 ans à composer du rock, on a voulu expérimenter un peu plus, aller plus loin que de simples riffs de guitares sur du groove binaire. Nos groupes préférés évoluent un peu comme cela à l’image de « Leprous » ou « Karnivool ».  Seven Eyed Crow est un melting-pot musical en permanent recentrage. L’émotion et le rock puissant sont les éléments centraux qui luttent contre des divergences fusion, jazz, hip hop, pop ou avant-gardistes. Le fil conducteur est subtil et nous laisse sur cette ligne de rock progressif mélodique. Nous avons tous pas mal trempé dans le néométal et la fusion dans notre jeunesse et nous en avons gardé l’absence de limites musicales et l’esprit d’ouverture qui animait ces groupes.  Notre style est une « niche » musicale qui peut débouter pas mal de puristes.

SEVEN EYED CROW affirme son identité et s’éloigne de ses racines 90’s/2000 ?

Pour mieux y revenir peut-être. Les crises politiques/climatiques/sanitaires sont en train de faire renaitre une particulière rage qui se ressentent déjà sur les nouvelles compositions. Je pense que le prochain opus sera beaucoup plus engagé, plus brutal et plus direct. En ce moment, nous renouons avec l’état d’esprit de notre première écoute de RATM avec une furieuse envie de gros riffs saturés (rire).

Malgré cet aspect aérien des compositions, l’impression qui se dégage de cet album est empreinte de nostalgie, voire un peu sombre. Est-ce la démarche de Icarus ? Quels sont les thèmes que vous abordez ici ?

Icarus est imprégné de thèmes dystopiques est de réflexions sur l’avenir de l’espèce humaine. Nos parentalités et nos deuils récents nous amènent à questionner le futur et à nous interroger : ou va l’humanité ? Ne finira t’elle pas par se brûler les ailes à vouloir se rapprocher du soleil, à vouloir se faire dieu ? L’artwork interroge aussi : explorer l’espace pour abandonner la terre ou essayer de la sauver du défi climatique ?

On s’est toujours sentis comme un groupe de rock au sens large

Qui écrit les textes et y a-t-il une « relecture » collective ?

Jay notre chanteur est en autonomie totale sur l’écriture de ses textes. Ils nous les fait relire voire nous les traduits. Nous n’y trouvons jamais rien à redire. C’est souvent très personnel et quand ca l’est moins, nous sommes en totale osmose avec sa vision que nous partageons.  Nous ne travaillons ensemble que sur les mélodies.

Comment voyez-vous l’évolution de SEVEN EYED CROW au fil des années ?

Comme le vin de Bordeaux, notre ville, on espère bien se bonifier avec l’âge. Cependant, je pense qu’on est encore assez jeunes pour sortir des brûlots incendiaires, en tous cas je l’espère (sourire). En tous cas, ce groupe est parti pour durer.

Quel regard portez-vous sur la scène rock française en général et prog en particulier ?

Le meilleur pour les groupes qui chantent en anglais. La France est pour nous un terreau de groupes novateurs et uniques. Aucun moyen, peu de scènes, un public général peu enclin à ce genre de musique par rapport aux US et aux pays de l’est et un désert coté médias mainstream. Et pourtant, on a vu éclore « Gojira » juste a coté de nous, des landais certes, mais bordelais d’adoption dès le début. On a immense respect pour Klone et pour Lizzard avec qui on a partagé quelques dates. Mention spéciale aussi pour les groupes dit « techniques » comme Gorod, Stomb ou Kadinja. Pour le rock chanté en français, on bloque… définitivement et durablement.

SEVEN EYED CROW n’est il finalement pas plus rock que « prog » aujourd’hui ?

On s’est toujours sentis comme un groupe de rock au sens large, tantôt dans certaines veines tantôt dans d’autres. On ne s’est jamais vraiment sentis comme groupe de progressif, version musique savante. C’est plus une passade, un mouvement, une branche de notre arbre. On pourrait dire la même chose sur le Métal.

Avez-vous une visibilité sur une reprise des concerts pour défendre votre nouvel album ?

Nos premiers concerts se sont tous annulés en raisons des restrictions sanitaires. Quelques dates sont maintenues en Nouvelle Aquitaine courant 2022 mais seule la crise sanitaire et le succès de l’EP décideront de la suite.

Que peut on vous souhaiter pour la suite ?

A défaut d’une grande tournée, on aimerait bien une belle première partie ou un tour support d’un artiste qui nous fait vibrer. Et assurément un autre album, vite !

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